François était persuadé que c’était sa volonté et elle seule qui déterminait sa croissance ; selon lui, si des dents avaient poussé dans sa mâchoire, c’était uniquement parce qu’il lui avait paru plus commode d’en avoir, plus esthétique surtout. Elles facilitaient sa digestion et lui faisaient un beau sourire. Il avait également grandi, d’abord pour atteindre les poignées de porte, puis les pots de confiture, et enfin pour changer les ampoules. Il s’était d’ailleurs un peu emporté et se trouvait tous comptes faits un peu trop grand. Et c’était là le drame, comme il se doit d’en être un : s’il décidait de sa croissance, il ne pouvait en aucun cas choisir de décroître. Fort heureusement, il en avait pris conscience avant de se faire pousser des défenses de sanglier ou des poils sur son visage pour rigoler. La farce aurait certainement tourné au cauchemar. Il aurait été traqué, contraint à l’exil. Sa vie n’aurait plus été que solitude et amertume et il aurait fini ses jours abandonné à son sort au fond d’une caverne sans eau courante ni ADSL, ou dans un cirque. « Quel chance que je n’ai pas été si bête ! ».
François, en vérité, très loin donc d’être un monstre de foire, n’était pourtant pas très gracieux. Et pourtant il s’y évertuait de toute son énergie et sa concentration ; il voulait que des femmes souhaitent faire l’amour avec lui et tentait donc naturellement de moduler sa croissance pour devenir le plus séduisant éphèbe que l’on puisse imaginer. Et les femmes le trouvaient tout juste « potable ». Cela n’avait aucun sens.
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