Le soleil était déjà assez élevé dans le ciel quand Jack arriva au manoir. Les lieux, autrefois propres et bien entretenus, tombaient aujourd’hui en ruine. Il sortit son arme, un Éclateur 3-05, un modèle dépassé depuis quelques temps mais toujours aussi efficace, et se dirigea vers l’entrée du bâtiment. De nombreux souvenirs lui revenaient, mais il essaya de les chasser de son esprit : il avait une mission… Une fois dans le grand hall, l’inspecteur se dirigea vers son ancienne chambre, mu par un étrange pressentiment. Il arriva dans l’aile Ouest et monta à l’étage, cherchant sa chambre, la numéro 14. Il y arriva enfin et ouvrit, ou plutôt enfonça la porte avec un coup de pied bien placé, son arme pointé en avant. Un message l’attendait sur son ancien lit : « Nous sommes deux amis, deux frères, unis à jamais par les liens de la souffrance commune. Nous échapperons ensemble aux Titans ou pas du tout, et nous vengerons les affronts subis par eux. Celui qui trahira ce serment sera pourchassé par le Destin, jusqu’à que vengeance soit accomplie. Ainsi soit-il ! »
Jack tomba à terre et hurla, emplie de peine et brûlant de rage. De rage contre Titan, contre lui-même. De peine envers cet ami qui aurait dû être mort et qui aujourd’hui accomplissait le serment qu’ils avaient prêté ensemble. Il ne fit pas attention au minuteur placé sous le lit, qui avançait inexorablement vers le zéro…

Bruce était en train de relire le dossier de son supérieur. Il prit soudain sa décision, se leva et passa dans la pièce commune.
« J’ai besoin d’une équipe pour aller au Manoir Harvard. Les volontaires, rejoignez-moi dans dix minutes au parking. »

Jack se releva et refit en sens inverse le chemin qui menait au grand hall. Intrigué par une note du tableau d’affichage, vieille de plusieurs années, il s’en approcha et la toucha :

Un homme parlait aux adolescents de 15 ans qu’il avait devant lui.
« Aujourd’hui, vous allez devoir montrer vos capacités et prouver votre valeur en réalisant un parcours qui mettra vos pouvoirs à rudes épreuves. Seuls les meilleurs survivront. Bonne chance à tous ! »
Les adolescents, morts de peur, s’avancèrent vers l’entrée des souterrains, sachant que bon nombre d’entre eux ne reviendraient pas.

L’inspecteur, sortant de sa vision, regarda la date de la fiche et la compara à celle du jour.
« Je m’en serai douté » marmonna-t-il.
Cela faisait exactement 17 ans que cette épreuve s’était déroulée. Soit une semaine après son évasion de l’orphelinat.
Une violente explosion retentit dans l’aile ouest du bâtiment.

« Capitaine, on signale une explosion au Manoir Harvard. »
Bruce soupira. Jamais il n’aurait cru son chef capable de ça. Car pour lui, aucun doute : l’inspecteur Everal devait être arrêté sur-le-champ.
« Continuez quand même, nous n’en sommes plus loin. »

Jack essaya de bouger, tous les nerfs de son corps lui indiquant une douleur intense. Il regarda sa jambe. Une poutre était tombée dessus. Il essaya de se dégager, quand la poutre s’envola soudain dans les airs et alla s’écraser quelques mètres plus loin. Il se leva tant bien que mal.
« Alors, Jack, ça fait mal ? Tu ressens une partie des souffrances que j’ai enduré par ta faute !
Mais aujourd’hui, toi seul va souffrir. »
Une onde de douleur traversa le cerveau de l’inspecteur, comme si un éclair lui était tombé dessus. Dans un flash aveuglant, il eut une vision :

Les deux enfants de 15 ans se déplaçaient le plus silencieusement possible dans les caves de l’orphelinat.
« La porte n’est pas loin, allons-y ! »
Soudainement, une alarme retentit.
« Cours ! »
Ils se mirent à courir le plus vite possible et débouchèrent dans une salle constituée d’une fosse d’eau dans laquelle se trouvaient des reptiles de toutes sortes. Un pont la traversait. Ils se mirent à courir. Ils étaient presque au bout lorsque le pont craqua. Le compagnon de Jack était encore dessus quand il tomba. De l’autre côté, leurs poursuivants sortirent leurs armes. Jack jeta un dernier regard à la fosse dans laquelle était tombé son ami, puis tourna les talons et traversa la porte. Il était libre.

Jack pleurait, conscient de sa lâcheté. Il méritait la mort.
« Oh non. La mort est trop douce pour toi. Tu entends ces sirènes ? »
Le convoi mené par Bruce était désormais devant l’entrée.
« Il y a des chances pour que tu passes la fin de ta vie en prison. Adieu, mon frère. »
Il tourna les talons et disparut.

Jack marcha vers la porte et la franchit. Son adjoint l’attendait. Il ne protesta même pas lorsque qu’ils lui passèrent les menottes.
« Jack Everal, je vous arrête pour quadruple meurtre, manipulation de vos adjoints, pour avoir orienté une enquête sur une fausse piste et pour avoir fait explosé le bâtiment où vous avez passé votre enfance. Tout ce que vous direz pourra être retenu contre vous. Vous avez le droit de contacter votre avocat. Si vous n’en avez pas, il vous en sera commis un d’office par la justice. Vous avez compris vos droits ? »
Jack acquiesça, complètement anéanti et souffrant.




« Il a échoué.
-Peut-être mais il connaît le meurtrier. Nous devons le faire sortir. C’est un homme d’honneur, il travaillera pour nous. Arrangez-vous pour les détails de l’opération. Mesdames et messieurs, la séance est levée. »
Huit des dix personnes quittèrent la salle.
« Pensez-vous que ce soit très prudent de le faire sortir ?
- S’il parle de l’organisation, le gouvernement ne nous couvrira pas. Il doit sortir coûte que coûte.
- Très bien. Je m’en occupe… »
Les deux hommes éclatèrent de rire et quittèrent la salle à leur tour.