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Relativité :
_ Il ne faut pas confondre la relativité et les paradoxes qu'on utilise pour l'illustrer. Toute vérité scientifique n'est valable que dans le cadre strict qui borne son expérience. Telle est la leçon que nous enseigne la relativité. Le Temps n'est pas une valeur sûre. Il traduit la réalité de l'évolution linéaire de l'entropie de l'univers, et rien d'autre. Le Temps n'acquiert de valeur que si on le place dans un système de repère défini, et limité. Qu'est-ce que le temps pour vous aujourd'hui ? Est-ce le décompte engrené par les horloges du calendrier galactique standard ? Est-ce plutôt l'horloge planétaire locale ?
_ Êtes-vous en train de nous dire que tout ce qu'on apprend en science est faux ?
_ Non. Je suis en train de vous dire que tout ce que vous croyez comprendre ne sera jamais qu'une approximation, et que chaque connaissance peut gagner ou perdre toute valeur si on l'étudie dans des contextes différents. Votre seule certitude absolue doit être que l'absolu n'existe pas. Et votre premier réflexe, celui de cerner le contexte.
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Extrait de cours,
École Normale de Tyrr - 9378 GS
La colline rougeoyait sous les explosions de notre bombardement. Ceux d’en face devaient commencer à comprendre qu’ils n’étaient pas dans le bon camp. Pourtant ils nous avaient donné bien du fil à retordre depuis le début du siège, deux semaines plus tôt. Ils avaient installé une sorte de bouclier de stase spécial qui n’arrêtait pas vraiment nos tirs mais qui obscurcissait la lumière. Toute la zone d’opération était plongée dans la pénombre, et les explosions de gros calibre en déplaçant des montagnes de terre et de cendre n’arrangeaient rien. Plusieurs fusées survolèrent en hurlant ma position, elles piquaient droit sur le sommet de la colline. Les explosions sourdes firent trembler notre casemate et de la poussière s’écroula sur l’objectif de ma lunette.
- Capitaine ?
Je me retournais.
- Qu’y a-t-il ?
- Le poste avancé 386 semble pris à parti par des forces ennemies. Ils demandent des renforts.
Je réfléchissais rapidement : le poste 386 ? où était-ce déjà ? ha oui, à deux ou trois kilomètres d’ici, j’aurais peut-être pu le voir si ma lunette n’était pas encrassée. Mais comment pouvaient-ils être attaqués alors nos ennemis étaient pilonnés jour et nuit ?... Je donnais rapidement des ordres pour vérifier par moi-même :
- Soldat, remets-moi cette lunette en état de fonctionnement.
Et je me tournais vers mon officier télécom :
- Demande au central un détail de notre poste avancé 386.
La casemate trembla encore sous l’effet d’une puissante explosion. Elle semblait étonnamment proche, pourtant. Ceci n’était pas normal, nos propres batteries ne se seraient-elles pas trompées de coordonnées encore ? C’était arrivé quelques jours plus tôt, ces planqués ne se posaient jamais trop de questions... Et au final c’était toujours à nous les trouffions de première ligne de faire tout le boulot.
- Capitaine, voici l’image satellite du poste 386.
L’écran de liaison afficha une photo haute résolution vue de haut. Ces clichés étaient assez difficiles à interpréter pour le néophyte, et l’obscurité ambiante n’arrangeait rien. Mais le doute n’était pas possible sur celle-ci : notre avant-poste était ravagé, et des combats éclataient un peu partout loin à l’intérieur de mon périmètre. Ces enfoirés avaient bel et bien enfoncé mes lignes ! Et dire que...
Une fusillade éclata non loin de nous, les armes de poing claquaient dans tous les sens, je verrouillait mon casque et armait mon fusil en lançant à mes hommes :
- Bougez vos armures les gars, on fait une sortie, groupe A protégez le central, les autres avec moi, Jorgshy, tu me nettoies les environs derrière nous centimètres par centimètres. Et je veux un soutien aérien ! Allez !
Nous sommes tombés sur nos assaillant dans les dernières coursives de mon QG de campagne avant l’extérieur : mes hommes les repoussèrent facilement. Des impacts de tirs striaient les murs et de grandes lézardes parcouraient les linteaux des portes. En me frayant un chemin parmi les décombres, j’arrivais finalement sur la plate-forme extérieure. Le combat faisait rage ici aussi : un vrai carnaval ! J’envoyais au tapis trois guignols qui tentaient de nous lober et je m’abritais derrière un poste de mitrailleuse pour interpeller mon second :
- Mais qu’est-ce que c’est que ce bordel les gars ?! Vous voulez que je fasse tout le boulot tout seul ou quoi ? Vous voulez le gagner ce putain de siège ? Vous la voulez leur colline ? Alors bottez leur le cul nom d’une pucelle ! Et renvoyez moi toutes ces lopettes dans leur trou à rat !
Je bondis de ma position suivi par quelques hommes et nous nous sommes plongés dans la tourmente. Les tirs tonnaient de toute part, les détonations fusaient dans toutes les directions et chacun en rajoutait du sien. Un vrai combat de corps à corps, nos sélecteurs de visée coloriaient en rouge vif toutes les cibles ennemies, sans cela ce serait le carnage assuré. Et même avec ça les erreurs existaient toujours : la poussière, le bruit, le stress et tout... Soudain mon intercom se remit à fonctionner et me donna le compte rendu de la bataille : nous repoussions l’assaut, mais à quel prix ! encore vingt-six gars au tapis. D’un coup un projectile arracha le haut de ma protection d’épaule, je me couchais dans un trou par réflexe. Je me plaquais à la pente et attendis en braquant mon canon vers le haut. Les deux ordures qui me passèrent par dessus furent pulvérisées sans remords. Je pus enfin jeter un œil à mon épaule : mon armure était salement amochée, et du sang engluait le tout. Évidemment, les dégâts empêchaient le système de soin automatique de fonctionner. Je me demandais souvent à quoi ils pensaient dans les labos ? Ils croyaient qu’on attendait sagement pour se tirer dessus et qu’on se plaçait bien de face pour que ça percute l’armure au bon endroit ? Tous des guignols !
Un de mes hommes tomba au fond de mon trou et lança derrière lui :
- Le capitaine est touché !
- Puis il m’agrippa en me demandant :
- Ça va vous tiendrez le coup ?
Je me redressais en le repoussant :
- Tu rigoles ou quoi, j’en ai vu d’autre ! On s’arrête pas les gars, allez, allez !
Nous nous sommes tous extirpés du trou et le soldat est reparti à l’avant. Des tirs fusaient encore, mais les explosions lourdes s’éloignaient maintenant en direction de la colline, toujours visible au lointain, toujours rougeâtre, et toujours bombardée... Une longue série de missiles partit de nos arrière et s’abattit sur nos assaillant qui détalaient. Ce tir de barrage acheva de les désorganiser, on voyait leurs silhouettes sombres reculer, elles ne maintenaient plus aucune formation. A découverts leurs soldats se faisaient fusiller sans pitié. Quelque chose me poussa et je tombais assis par terre, je me retournais vivement mais un infirmier me stoppa net :
- Du calme, je soigne ça et vous pourrez continuer à crapahuter dans la boue.
Un comique. Je ne l’avais même pas entendu venir. Un hurlement strident passa au-dessus de nos tête et des dégazements bref éclatèrent en série. C’était la réaction de notre central... Un peu tard tout de même, mais bon, c’est l’intention qui compte : les droïds tueurs tombaient des transports aériens les uns à la suite de autres. Aussitôt au sol, ils sortaient leurs armes et se mettaient en chasse, ils étaient redoutablement précis, rien de tel pour débusquer les snipers cachés. Même derrière un tas de gravats, ces robots localisaient leurs cibles et ne faisaient pas de quartier. L’un d’eux se rapprocha de moi et ... ! M’ayant presque tiré dessus ses salves détruisirent un pan de tranchée qui s’écroula lourdement derrière moi. Un bras d’exo-armure tordu dépassait du monticule. Finalement on pouvait dire que j’avais eu chaud, ce gars-là avait du voir mon insigne d’officier... Pourtant je ne pouvais m’empêcher de ne pas aimer ces bestioles mécaniques : avec leurs pinces et leurs petits yeux rouges mauvais. Et si leur programmateur avait fait des erreurs ? Je n’aimerais vraiment pas être flingué par un Bug informatique.
Cette fois c’était le jour avec un grand J, les sections Alpha 4 et 5 allaient pousser une dernière fois sur les défenses du bastion de la colline pour l’enlever définitivement. Nous étions déjà maîtres de la moitié du terrain. Ma blessure à l’épaule m’avait fait reléguer dans le QG central bien en retrait des lignes de front. Je remplissais un rôle “ stratégique ” paraît-il. Stratégique ou pas, les bavardages de l’état-major avaient toujours eu un puissant effet soporifique sur moi. Ces gars-là dissertaient des heures pour nous donner des ordres, alors qu’ils ne savaient même pas tenir un fusil d’assaut... Une de leurs phrases avait attiré mon attention :
- Une fois que nous serons là-haut, personne ne pourra nous en déloger !
Personne, vraiment ? Je tournais les yeux vers l’immense colline de toutes les convoitises. Indélogeables, vraiment ? N’était-ce pas ce qu’ils c’étaient dit eux-aussi les pauvres gars que nos sections d’assaut finissaient de massacrer ? Deux semaines de demi de combat acharné pour s’installer dans leurs bottes et attendre tranquillement que quelqu’un de plus fort que nous vienne à son tour nous mettre une raclée... Je n’ai pu m’empêcher de leur répondre que cette victoire, elle sentait vraiment la merde.
Jorgshy était mort lors du dernier assaut. Un transport de droïd avait été abattu juste au-dessus de son équipe et s’était écrasé sur eux. C’était la fin prématurée d’une longue collaboration... Mon vieil ami, serais-tu mort pour rien ? Je regardais de nouveau cette masse de terre diabolique, là dehors. Cette planète était il n’y pas si longtemps encore une tranquille colonie minière. Le relief était assez plat, sauf cette monstrueuse excroissance, comme une grosse verrue, planté là par une main mystérieuse. Elle faisait 360 kilomètres de diamètre, pour 19 kilomètres d’ascension. C’était le plus haut sommet de tout ce système solaire et nous étions là, à batailler pour nous y terrer tels des lapins effrayés.
Ah, Jorgshy, c’est quand même bien dérisoire de finir comme ça, ici.
Mais je te le jure, à toi et à tous les gars qui sont restés sur ce tas de cailloux. On s’y installera et on le tiendra jusqu’au bout. Quoi qu’il en coûte. Je ne sais pas à quoi ressembleront nos prochains ennemis, s’ils seront nombreux, forts ou vicelards. Mais nous leur tiendrons tête, nous leur montrerons de quoi des humains sont capables, nous défendrons votre cairn, dormez tranquilles frères d’armes, nous dresserons une ultime pierre en ce lieu. Une pierre qui proclamera à tous :
- Ci-gisent cinq milles braves qui donnèrent leur vie pour retarder l’envahisseur.