(Cet article fait partie du dossier sur l'
état des lieux des jeux de gestion en 2010
)
Univers
La série des Anno place le joueur dans la peau d'un courageux explorateur parti découvrir ce qui deviendra le Nouveau Monde. Les jeux se déroulent donc autour du XVIème et du XVIIème siècle. A noter que les années mentionnées dans les titres des jeux n'ont pas d'impact précis sur l'époque de jeu, il n'y a pas de lien avec des évènements ni des lieux historiques.
Principes
Accostant sur une île vierge avec
votre bite et votre couteau
des vivres et des outils, il s'agira d'établir une colonie autonome et de faire fortune en exploitant les ressources naturelles disponibles. Pour cela, il s'agira de mettre sur pied différents chaînes de production. Cela rappelle assez
la série des Settlers
, mais avec des particularités qui rendent la série des Anno unique.
Par exemple, pour débloquer les constructions avancées, il faudra satisfaire les besoins de votre population pour qu'ils évoluent vers des statuts de moins en moins crasseux. Ainsi, Si les Pionniers de base se satisfont de poisson cru et de gibier, les Colons exigeront du tissu et l'accès à une chapelle, tandis que les Citoyens voudront s'amuser un peu avec de l'alcool et fréquenter des écoles, et ainsi de suite. Problème, chaque île de la carte ne peut fournir qu'une variété limitée de ressources, il faudra donc installer des comptoirs commerciaux sur différentes îles pour satisfaire vos concitoyens les plus exigeant. Mais comment y aller ? En bateau pardi !
Anno vous permet de gérer une petite flotte de bateaux que vous pourrez construire et armer vous-même, du petit navire de commerce qui vous permettra de ramener les précieuses denrées de vos comptoirs vers votre île principale via des routes commerciales régulières, au grand navire de guerre qui vous permettra de vous débarrasser une fois pour toute des pirates ou d'un rival gênant.
Voici donc énoncés les trois piliers d'Anno dont les développeurs ne s'écarteront pas d'un pouce de toute la dynastie :
- Chaînes de production élaborées
- Gestion de navires et de routes commerciales
- Population capricieuse
A noter que la série des Anno, tout comme la série des Settles, est la digne héritière de la tradition des jeux allemands basés sur une mécanique de jeu solide demandant beaucoup de planning et d'optimisation en mettant très peu l'accent sur le conflit entre les joueurs.
Présentation des épisodes
Anno 1602 À la conquête d'un nouveau monde
Année de publication
:
1998
J'ai découvert la série des Anno avec son premier opus, Anno 1602 auquel j'ai énormément joué. Pourtant, je n'y rejouerais plus volontiers aujourd'hui, car tous ses descendants ont repris tels quels ses principes et la majorité des chaînes de production, en améliorant qui l'ergonomie, qui les graphismes. Aucun réel intérêt aujourd'hui d'y rejouer, donc. Sa présentation me permettra toutefois de poser les bases de la comparaison avec les épisodes suivants.
Gameplay
Un début de partie d'Anno 1602 commence toujours avec un bateau chargé de matériaux de construction au milieu d'une carte inexplorée. La première chose à faire est donc d'explorer les îles alentours pour dénicher une île accueillante pour vos premiers pas dans le Nouveau Monde. Une fois la perle rare trouvée, c'est le moment d'y installer un entrepôt portuaire. Ce dernier vous permettra de stocker vos marchandises et de faire du commerce avec l'extérieur. A partir de là, vous êtes libres de construire sur ce qui est désormais votre île. Mais pas partout.
Anno 1602 est basé sur le principe des zones d'influence. La plupart des bâtiments ont des zones circulaire d'influence de tailles diverses et dont l'effet varie avec le type de bâtiment. Pour les entrepôts et les marchés, la zone d'influence détermine le territoire constructible en même temps que la zone de couverture pour l'envoi de chariots collecteurs de marchandises. Pour les fermes et autres producteurs de matières premières, la zone d'influence indique la zone de travail. Pour les manufactures, la zone d'influence indique la distance maximale que l'artisan couvrira pour s'approvisionner en matières premières. Et enfin, les maisons doivent être incluses dans les zones d'influence des bâtiments publics (églises, écoles, pompiers, docteurs) pour bénéficier de leur service.
Ainsi, il s'agira de bâtir un réseau serré de marchés pour éviter les délais dans l'acheminement des marchandises, de prévoir le plan de votre ville principale de manière à ne pas devoir construire trop de bâtiments publics en double pour couvrir toutes les maisons, et à placer les manufactures proches de leur matières premières ou au moins d'un marché. Tout cela fait d'Anno 1602 un jeu requérant pas mal d'optimisation et de planification, car les îles ne sont pas infinies, il faut faire tout tenir dans des territoires limités.
Anno 1602, à l'instar de The Settlers III dont il est contemporain, permet de gérer un nombre impressionnants de denrées différentes, approchant la cinquantaine, depuis les denrées de base en passant par les produits de transformation pour arriver aux produits finis. Il faut exploiter le bois, la pierre, le fer, la laine, la viande et la terre pour mettre une colonie prospère sur pied. Mais qu'est-ce qu'une colonie prospère ? C'est une colonie qui paye des impôts !
Ce rôle est dévolu à votre population. Petite particularité, les travailleurs et les payeurs d'impôts sont deux populations bien distinctes. Vous ne verrez jamais un payeur d'impôt au travail, pas plus que de construire des manufactures n'améliorera vos revenus. Et pourtant, devinez quelle est la population qui exigera le plus de produits finis et d'accès aux services municipaux ? Je vois que vous avez compris. Comme indiqué dans les Principes, les payeurs d'impôts sont disponibles en plusieurs saveurs. Les pauvres cabanes de bois que vous pouvez construire abritent des Pionniers, les plus rustres de vos concitoyens. Tant qu'ils ont le ventre plein, vous ne les verrez jamais se plaindre.
Si vous leur bâtissez une chapelle et leur fournissez du tissu via un tisserand qui se fournira en laine chez un berger, ils prendront dans les stocks des matériaux de construction pour améliorer leurs baraquements afin de refléter leur nouveau standing : ce sont devenu des Colons. Eux ont besoin d'alcool, d'épices, de tabac et d'avoir accès à une taverne et une école pour s'auto-promouvoir en Citoyens. Ceux-ci ont besoin de cacao, d'une église plus imposante et de bains publics pour devenir des Marchands qui exigeront des bijoux, des vêtements, un théâtre et une université pour atteindre le dernier niveau d'avancement, celui d'Aristocrates.
Evidemment, chaque niveau de population rapporte plus d'impôts, mais fournir les biens de consommation demandés coûte cher, car chaque bâtiment de production possède un coût de fonctionnement. Réussir à équilibrer son budget est donc la gageure de ce jeu, et il sera parfois plus profitable de s'arrêter à un niveau de population donné plutôt que d'essayer d'atteindre le niveau supérieur, vu les coûts supplémentaires engendrés.
Côté militaire, Anno 1602 est assez pauvre. La guerre coûte très cher à cause de chaînes de production complexes et n'est pas encouragée par une ergonomie proche de la nullité. A part les pirates qui attaquent tout le monde, aucun joueur IA ne vous attaquera de sa propre initiative, ce qui permet souvent de remporter les différents scénarios proposés sans coups férir. Il est déjà bien assez difficile d'avoir une balance opérationnelle positive sans devoir en plus la gréver avec la solde des unités militaires peu variées.
Graphismes
Anno 1602 est en 2D isométrique avec plusieurs niveaux de zoom, la possibilité de changer l'angle de vue, bref, tout ce qu'il faut. Les couleurs sont vives mais pas trop, les détails sont nombreux, bref, les graphismes ne sont pas trop obsolètes en eux-mêmes, si ce n'est un petit manque d'animations des bâtiments compensé par la vie créée par les porteurs et les artisans allant chercher leurs matières premières. Il est également possible de pousser jusqu'en 1024x768, ce qui était une résolution de luxe à l'époque !
Mon avis personnel
Anno 1602 garde évidemment une place à part dans mon coeur de vieux joueur nostalgique, mais pour autant il est aujourd'hui clairement dépassé par ses descendants, et il n'y a pas grand-chose de particulier à cet opus-là qu'on ne pourrait retrouver qu'en y rejouant actuellement. Pourtant, c'est ce jeu qui a jeté les bases de la série, il mérite donc une place honorifique dans mon panthéon du jeu vidéo.
Anno 1503 Le Nouveau Monde
Année de publication
:
2003
J'ai très peu joué à 1503, pour une raison très simple : trop similaire à Anno 1602 dans les premiers stages du jeu. Aucune nouveauté accessible rapidement, je me suis lassé très rapidement. Les changements par rapport au premier opus que je vais rapidement détailler ci-après sont donc issus de mes lectures sur le sujet, notamment sur le site
GameFAQs
qui héberge des guides très détaillés pour tous les jeux du monde ou presque.
Gameplay
Le changement principal vient de la manière de percevoir les revenus : à la place d'impôts dont le montant dépendait du niveau de civilisation et du niveau de taxation qui pouvait être augmenté à mesure que vous satisfaisiez les besoins des habitants, l'argent est maintenant perçu en fonction de la consommation des produits finis. Il faut donc être encore plus attentif au niveau de production des produits finis, car une surproduction coûte cher d'entretien et les produits en trop ne rapportent pas d'argent.
Les chaînes de production ont également été revues, et pour la plupart étendues. Les principes de base sont toujours les mêmes, les artisans vont s'approvisionner en matières premières dans leur zone d'influence, il n'y a que le dernier maillon de la chaîne qui change, à savoir la vente à vos habitants, via des échoppes qu'il faudra cette fois placer dans la zone d'influence des habitations. Cette nouveauté s'applique également pour tous les bâtiments publics qui n'ont plus de zone d'influence propre.
Anno 1503 marque également l'avènement de la recherche. Une fois une école (puis une Université) construite, il sera possible de subventionner des recherches qui permettront de construire de nouveaux bâtiments ou d'améliorer légèrement les bateaux et unités militaires.
Enfin, le côté militaire est un peu amélioré notamment au niveau de l'ergonomie, mais ça n'en fait pas pour autant un jeu de guerre, les principes pacifistes de la série sont conservés.
Graphismes
Les graphismes sont encore en 2D isométrique, mais c'est pour le mieux. Le niveau de détail est impressionnant, on peut zoomer très près pour le bonheur des yeux. Le style est très comparable à celui d'Anno 1602, en beaucoup plus détaillé. Pas d'autres particularités graphiques, ce qui renforce l'impression de similarité avec Anno 1602.
Mon avis personnel
N'y ayant pas joué beaucoup, j'aurais du mal à vous donner un avis personnel assez pragmatique, néanmoins le petit changement de gameplay lié aux revenus a pu éventuellement relancer l'intérêt pour Anno 1503 après avoir éclusé Anno 1602. Je mets au passé car les opus suivant enterreront Anno 1503 dans le cimetière des jeux vidéos oubliés, avec comme épitaphe "Anno 1503 ? C'est lequel déjà ?"
Edit du 16/04/2012
Ayant récemment remis la main sur tous les opus PC de la série, j'ai pu enfin recommencer une partie du bon pied. Peine perdue, l'exploration des îles via des unités contrôlées manuellement et le système de vente des produits de consommation aux habitants qui remplace les impôts a vite eu raison de ma bonne volonté. C'est définitivement le jeu que je préfère le moins dans la série.
Anno 1701
Année de publication
:
2006
J'ai découvert Anno 1701 récemment, trouvé en réédition peu chère, c'est ce qui m'a décidé, après ma déconvenue d'Anno 1503. Cet opus marque le passage de la série à la 3D, bien après tous les autres jeux. La série des Anno aura-t-elle su éviter l'écueil de la 3D moche ?
Gameplay
Niveau gameplay, si Anno 1503 avait fait un petit pas hors du cercle des principes de base de la série, Anno 1701 se charge de le corriger. Nous revoilà en plein dans Anno 1602, les habitants payent de nouveau des impôts, les modifications apportées aux chaînes de production ont été diminuées sans pour autant revenir à l'exacte situation d'Anno 1602, et la recherche a malgré tout été conservée.
Petit ajout original, il est désormais possible, via la recherche, d'avoir accès à des actions spéciales, comme voler de l'or à un adversaire ou détruire un rocher gênant sur votre île. Ces actions sont une sorte de gadget superflu qui n'a aucune réelle influence sur le fond du jeu.
Mais alors, Anno 1701 c'est juste un Anno 1602 un peu gonflé ? Que nenni ! Car ce qui vous retiendra à jouer à ce jeu, bien plus que des mécaniques efficaces mais un peu éculées, ce seront les graphismes.
Graphismes
Les petit gars de chez Sunflowers ont voulu retarder au maximum le passage à la 3D de la série des Anno pour pouvoir y entrer par la grande porte. On l'a vu dans les deux opus précédents, les graphismes sont une part non-négligeable de l'agrément de jeu, par ailleurs assez austère, de la série des Anno. Anno 1701 ne déroge pas à la règle.
Les fonctions de zoom et de rotation de carte sont bien évidemment améliorées grâce au passage à la 3D, et si on pouvait louer le niveau de détail d'Anno 1503, vous pourrez ressortir vos louanges pour Anno 1701, qui a été pas mal amélioré sur le point de la vie urbaine. Les paysages, notamment les détails marins, sont magnifiques, et vos habitants déambuleront à travers votre ville, se rendant au centre-ville ou dans les bâtiments publics, leur nombre croissant avec celui de votre population.
La petite cerise sur le gâteau, c'est ce mode Carte postale qui permet de masquer toutes les interfaces de jeu pour ne laisser que les graphismes parler d'eux-mêmes. La colonisation du Nouveau Monde en HD, ça en jette méchamment.
Mon avis personnel
Malgré son retour manifeste aux bonne vieilles recettes de grand-mère Anno 1602, Anno 1701 possède un charme certain grâce à son habillage graphique très réussi, et que vous le veuillez ou non, la magie Anno opérera à nouveau en vous scotchant de longues heures devant ces paysages bigarrés animés par une vie que vous seul avez créée.
Anno 1404
Année de publication
:
2009
Anno 1404 a déjà été chroniqué sur ce site, voir
le test d'Anno 1404 par Ivaldir
.
Je n'ai pas encore eu l'occasion d'y jouer moi-même, mais il semble bien qu'Anno 1404 emprunte la même route pavée par ses ancêtres, et ce malgré le changement de propriétaire. C'est effectivement Ubisoft qui s'est payé la licence Anno, et on pouvait éventuellement espérer un remaniement de fond. Pas folle la guêpe, on ne change pas une équipe qui gagne, et le nouveau maître des lieux a conservé les principes et l'esprit des jeux de la série Anno . La nouveauté semble être qu'il faille satisfaire les besoins de deux populations différentes au lieu d'une dans les autres jeux de la série. Là encore, on est loin de renouveler le genre en profondeur, mais apparemment la recette fonctionne encore, servie par des graphismes encore plus beaux que ceux d'Anno 1701 si c'était encore seulement possible.
Edit du 16/04/2012
Vous avez maintenant la possibilité de lire mes avis sur Anno 1404 dans les posts suivants :
Anno 2070
Année de publication
:
2011
Pourtant basé dans un contexte de futur proche, Anno 2070 reste une copie conforme d'Anno 1404 auquel il reprend tous les concepts accumulés depuis Anno 1602. Là-dessus, vous saupoudrez de quelques menus concepts supplémentaires (recherche scientifique, colonisation sous-marine, gestion de l'énergie et de l'écologie) qui achèvent de complexifier une série qui devient légèrement boulimique.
La petite cerise amère de la connexion à Internet obligatoire pour y jouer vient compléter ce gâteau appétissant visuellement mais qui se révèle malheureusement assez peu digeste.
Si vous en voulez encore, vous pouvez aller lire
le test d'
Anno 1404 dans le futur
Anno 2070
.
Anno sur Nintendo DS
Récemment, la série des Anno s'est tournée vers la console portable de Nintendo. La puissance de cette dernière et l'adjonction du stylet a permis l'avènement de jeux complexes de gestion/stratégie sur ce support.
La série des The Settlers
n'y a pas échappé, par plus que la série des Sim qui ont tous sorti leur version DS sensiblement au même moment que celui de la série des Anno.
Anno 1701
Année de publication
:
2007
Je dois avouer que j'ai été conquis par cette version simplifiée d'Anno parfaitement jouable au stylet et privée de ses lourdeurs habituelles grâce à des chaînes de production réduites et l'absence de routes commerciales, des tailles d'île plus petite, etc... Les graphismes sont très proches de ceux d'Anno 1602, ce qui a ravi mon goût pour la nostalgie, et aucune lenteur ni manque d'ergonomie est à déplorer.
Le jeu parvient donc à accrocher malgré ou plutôt grâce à sa simplicité de jeu et de prise en main, un régal à emporter partout !
Anno Créez votre monde
Année de publication
:
2009
Plus récent et accompagnant la sortie d'Anno 1404, Anno Créez votre monde se paye le luxe du passage à la 3D sur la petite console portable, malheureusement le niveau de détail chute par rapport à son prédécesseur, et le niveau d'intérêt également, la simplification a été encore plus loin, sans doute pour toucher un public encore plus jeune. On se retrouve avec un jeu fade dans tous les sens du terme. A éviter donc.
Le jeu a été également publié pour la Wii, dont les contrôles sont un peu moins précis que ceux de la Nintendo DS, ce qui peut également expliquer le sursimplification de l'ergonomie.
Conclusion sur la série
La série des Anno est l'allégorie même de l'immobilisme. Les principes de gameplay sont restés les mêmes (au iota près) depuis plus de 10 ans maintenant, servis par des graphismes toujours très détaillés. On pourrait se demander si à la longue ça ne lasserait pas, mais visiblement le succès est toujours au rendez-vous. On voit mal dans ces conditions comment cette série pourrait ne pas continuer à exister pendant de longues années, en maintenant un cap qui s'est toujours jusque là montré profitable.
La série des Anno est donc un modèle dans le domaine du jeu de gestion, ayant réussi à conserver sa propre identité très particulière en n'essayant jamais de singer la concurrence. A découvrir ou à redécouvrir d'urgence, le dernier opus sorti étant toujours le meilleur choix.
Edit
: A l'occasion de l'ouverture des catégorisation
iPhone/iPod
et
iPad
, j'ai découvert qu'il existait un Anno : The Harbor disponible sur ces deux plate-formes, mais je n'ai pas eu encore l'occasion d'y jouer.