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Le peak oil, ou pic pétrolier, est le symbole de la fin d'un (du ?) monde : celui dominé par le pétrole.
La nouvelle fait l'effet d'un choc. Le rapport 2010 de l'agence internationale de l'énergie (AIE), dont le siège est à Paris, tombe à la mi-novembre. Une bombe est lâchée et assène un sacré coup sur la question du pic pétrolier. Dans ce rapport, il y est affiché "La production de pétrole brut se stabilise plus ou moins autour de 68-69 Mb/j (millions de barils par jour) à l'horizon 2020, mais ne retrouve jamais le niveau record de 70 Mb/j qu'elle a atteint en 2006". L'interprétation à faire de cette phrase, c'est que jamais la production mondiale de pétrole ne pourra augmenter à l'avenir si le besoin s'en ferait sentir.
Le pic pétrolier fait référence aux travaux de Hubbert, qui exposa sa théorie dans les années 1940 que la production d'une ressource limitée, en particulier le pétrole, suivait une courbe en cloche, à condition que le cours ne subisse pas l'influence d'évènements extérieurs (guerres, destructions, etc.). Cela signifie que la production augmente avec le temps, jusqu'à arriver à son maximum, avant une forte diminution. Hubbert et sa théorie devinrent impopulaires dès le départ car il prédit le pic pétrolier des États-Unis aux alentours de 1970, mais ses travaux finirent par être exhumés et célèbres lorsque le pic eut effectivement lieu en 1971.
L'explication de ce phénomène, c'est qu'à partir de la moitié du gisement l'extraction devient plus difficile. N'imaginez pas une cuve remplie de pétrole, dans laquelle on y insérerait un tuyau pour tout aspirer. Il s'agit en fait d'une roche poreuse qui contient le précieux liquide, et que l'on extrait par pression. Tandis que le superficiel est facile à extraire, ce qui vient ensuite est chaque fois de plus en plus long et difficile à récupérer.
Il faut signaler que le pic reste une théorie. L'expérience montre qu'au niveau mondial, la production ressemble en fait davantage à un plateau qu'à un réel pic. Mais la descente reste certainement inévitable, et ce dans un délai relativement proche. Il y a plusieurs raisons logiques à cela :
Pour répondre à cette question, il faut d'abord comprendre à quel point nous dépendons tous du pétrole. Nos sociétés en ont un besoin chaque année plus vorace, et dans tous les domaines : pour le transport, la nourriture, les technologies, absolument tout. Comment essaimer nos champs sans pétrole ? Répandre et récolter la nourriture ? Comment la transporter jusqu'aux marchés ou supermarchés ? Comment fabriquer du plastique, présents partout aujourd'hui, sans pétrole ? Même l'électricité française, réputée pour se reposer sur le nucléaire, est dépendant de l'or noir, pour la simple raison que le combustible, c'est-à-dire l'uranium, doit être transporté (on l'importe, n'est-ce pas), raffiné, transformé, évacué.
Le pic pétrolier signifie que la production ne pourra jamais être augmentée. Or, si la consommation continue son augmentation, le prix du baril augmentera également par le jeu de l'offre et la demande. Il en résultera que si le prix du baril augmentera, alors tout ce qui en est dépendant augmentera. L'électricité, la nourriture, le plastique, absolument tout. Et probablement de façon insupportable à long terme.
La réponse est non. On l'a vu plus haut, le nucléaire aussi a besoin de pétrole. Et contrairement à ce que beaucoup de gens pensent, les centrales nucléaires ne nous rendent pas moins dépendant du pétrole. La preuve en chiffres : en comparant avec l'Allemagne, qui est relativement proche de nous en terme de puissance, en 2005 la France a consommé près 2 millions de barils (Mb) par jour, l'Allemagne 2,6 Mb/j, cette différence de 0,6 Mb/j pouvant s'expliquer la plus grande puissance de notre voisin. Et ce alors que le nucléaire représentait environ 80 % de la part de l'électricité chez nous, et 25 % chez eux.
Non, l'avantage du nucléaire est en réalité de nous rendre plus indépendant vis-à-vis du charbon. En 2005, l'Allemagne en consommait 82 millions de tonnes équivalent pétrole (MTep) contre 13 MTep en France.
Mauvaise nouvelle. La technologie ne peut nous sauver du désastre imminent. Dans un article publié dans le canard enchaîné (du 22 décembre), il y est fait mention de notre dépendance aux terres rares. Ce sont des métaux très rares, mais indispensables à nos technologies d'aujourd'hui, et dont la particularité est d'être très difficile à extraire et raffiner (cela requiert beaucoup d'énergie et se fait dans des conditions écologiques et sociales désastreuses). 97 % de ces métaux sont détenus par... la Chine !
On les retrouve dans les écrans plats, les ordinateurs portables, les téléphones portables... mais aussi dans les lampes basse consommation, les LED et les cellules solaires à haut rendement, les cellules photovoltaïques, ou encore dans certains moteurs électriques ou générateurs d'éoliennes.
Le rapport de l'AIE est révélateur de la crise qui s'annonce proche. L'agence a par le passé été toujours trop optimiste vis-à-vis du pic pétrolier. Une seule fois, le rapport de 1998 annonçait le pic pétrolier entre 2012 et 2020, information que l'agence a tenté de désamorcer par la suite en atténuant ses propos. Un jeune thésard britannique montra par la suite que l'AIE se voulait volontairement peu alarmiste dans le seul but de ne pas affoler les marchés financiers.
D'autant que le rapport 2010 semble une nouvelle fois pécher par excès d'optimisme. En effet, il y est indiqué que l'AIE prévoit que d'ici à 2035, on y découvrira jusqu'à un total d'environ 23 Mb/j de nouveaux gisements. C'est-à-dire dénicher deux fois la production de l'Arabie Saoudite en 25 ans. Sachant que le dernier grand gisement découvert date des années 70, il y a 40 ans, cela reste très peu probable. En plus de cela, l'AIE prévoit que l'Arabie Saoudite pourra passer d'une production aujourd'hui de 9,6 Mb/j à 14,6 Mb/j en 2035. Très peu probable lorsque l'on sait que le Pentagone a prévu un déclin imminent des extractions saoudiennes, et que le roi Abdallah d'Arabie Saoudite a annoncé arrêter l'exploration pétrolière dans son royaume.
Vous voyez au-dessus les prévisions de l'AIE nettement vues à la baisse entre 2008 et 2009. D'autant que l'agence table sur une diminution de la consommation des pays industrialisés dans les prochaines années (diminution nullement prévue par les mêmes pays), et même demande à tous les pays de développer massivement leurs énergies renouvelables... pour diminuer le réchauffement climatique ! Le climat ne serait-il pas une excuse ?
Il faut savoir que les experts suspectent les gouvernements de grossir officiellement leurs réserves de pétrole afin de rassurer les marchés financiers. En gros, même si la production devait diminuer, les États auraient assez de stocks chez eux pour tenir relativement longtemps avant de subir une véritable récession économique. La vérité est sans doute difficile à discerner dans cette histoire mais une chose est sûre : il faut s'attendre à ce que les années 2010 et 2020 deviennent très difficile pour le monde entier. La crise économique de 2008 est sans doute la première d'une longue série.
http://petrole.blog.lemonde.fr/
(très intéressant, rassemble des informations sur l'actualité qui ne se retrouvent pas forcément ailleurs, avec des analyses détaillées et claires).
http://fr.wikipedia.org/wiki/Pic_p%C3%A9trolier
(article complet qui réunit les problématiques d'aujourd'hui, avec beaucoup de détails. Peut-être un peu trop, mais on peut passer ce qui n'est pas essentiel).
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