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Pandémie

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Ertaï



Ersatz de régnant.

Fiche technique

Jeu évènement à lui tout seul, Pandémie a su se propager infectieusement dans le paysage socioludique, analyse.


Acclamé par la critique, aussi bien médiatique qu'amateur, ce jeu a défrayé la chronique par ce simple fait : Pandémie est un jeu coopératif pour adulte. Ça n'a l'air de rien, mais c'est une petite révolution dans le monde du jeu de plateau. Les jeux coopératifs existent depuis longtemps, les jeux pour adultes également, mais à ma connaissance aucun n'avait tenté le coup de réunir les deux.

Analyse clinique des vibrions

Le jeu Pandémie propose de mettre les joueurs dans la peau d'une équipe mondiale d'experts médicaux tentant de contenir voire éradiquer quatre grandes maladies pandémiques. Le plateau figue donc un planisphère sur lequel un maillage des principales villes mondiales est imprimé.

Le monde est divisé en quatre grandes régions qui regroupent l'Europe de l'Ouest et l'Amérique du Nord, l'Amérique du Sud et l'Afrique subsaharienne, le Maghreb et le Moyen-Orient et l'Inde, et enfin l'Asie et l'Océanie. Au début du jeu, chaque région est le siège d'infection d'une des quatre grandes maladies.

La tâche de nos héros sera rude, car le temps joue contre eux. En effet, après le tour de chaque joueur, de nouvelles villes sont atteintes par une des quatre maladies, étendant ainsi un peu plus leur ombre sur le monde connu.

Des mécaniques contagieuses

Chaque joueur (jusqu'à 4) doit choisir un des 5 rôles. Ces rôles offrent chacun des capacités spéciales par rapport aux possibilités standard. Par exemple, le Médecin fait des merveilles pour soigner, tandis que le chercheur sera plus apte à découvrir les remèdes aux 4 maladies. Ce choix de 4 parmi 5 est intéressant car il renouvelle l'expérience de jeu pour chaque rôle laissé de côté.

Malheureusement, dans cette version de base, un des rôles est globalement moins intéressant que les autres, j'ai nommé l'Expert aux Opérations, ce qui en fait l'écarté régulier des parties à 4. Heureusement, l'extension "Au Seuil de la Catastrophe" apporte une version requinquée de ce rôle utilisable avec le jeu de base.

Autre système intéressant, si les villes touchées lors des contaminations normales ne sont pas connues à l'avance, en revanche des épidémies se déclenchent régulièrement et augmentent la pression sur les épaules des joueurs, ce qui fait monter l'ambiance d'un cran et presse un peu plus à découvrir les remèdes des maladies.

Ces remèdes d'ailleurs sont l'objectif principal du jeu. Dès que les 4 remèdes sont découverts, la partie est collectivement gagnée, quel que soit le nombre de villes encore touchées par lesdites maladies.

Il existe également des objectifs secondaires consistant à éradiquer chacune des quatre maladies. Une maladie est considérée comme éradiquée quand le remède a été découvert et toutes les villes infectées par cette maladie ont été traitées. Dans ce cas, la maladie éradiquée ne peut plus jamais nuire, ce qui allège singulièrement le fardeau de notre équipe de choc.

Cependant, éradiquer une maladie peut être risqué, car le soin minutieux de chaque ville infectée fait perdre un temps qui est précieux pour trouver les remèdes des autres maladies, et finalement, à vouloir trop bien faire, on peut se retrouver pris de court par les autres maladies et finalement perdre.

Une mécanique qui se grippe facilement

Le plus gros avantage du jeu, sa collectivité, en fait également son plus grand défaut. En effet, la coordination entre les joueurs étant cruciale pour vaincre ensemble, de nombreuses discussions sont nécessaires. A ce stade-là il vaut mieux que tout le monde soit également intéressé par le jeu. Car si ce n'est pas le cas, émergeront rapidement deux groupes : les décideurs, et les passifs.

Les décideurs, comme leur nom l'indique, passeront le plus clair de leur temps à organiser la stratégie globale, à tort ou à raison d'ailleurs. Ils se chargeront de prévoir les éventuels risques d'éclosion, de faire se rencontrer les joueurs ayant les bonnes cartes, de construire les bases de recherche, et de trouver les remèdes aux maladies.

Les passifs, eux, pousseront leur pions comme on leur a indiqué, et piocheront les cartes faisant évoluer les maladies, et c'est à peu près tout. Tout simplement parce qu'ils ne peuvent ou veulent pas suivre les décideurs dans leurs discussions interminables sur l'intérêt de trouver un remède pour telle ou telle maladie en premier, l'importance de guérir la population dans une ville donnée, etc...

Un jeu classé P4

Ce jeu n'est donc, à l'instar des laboratoires éponymes, pas accessible à tous les types de joueurs. En tout cas pas à plusieurs types en même temps. Le cas classique est celui où quatre joueurs s'installent autour de la table, mais dont deux seulement vont finalement vraiment jouer, les deux autres étant entraînés parfois malgré eux. Moins que la connaissance préalable du jeu, l'envie de jouer pure ou la cérébralité absolue, c'est bien l'hétérogénéité des joueurs qui est la faille de ce jeu autrement bien conçu.

A réserver donc aux groupes de joueurs homogènes avec la même volonté ludique et des inclinations à la réflexion similaires. En cela ce jeu n'est pas du tout démocratique, malgré l'absence de confrontation.

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Je retrouve mon opinion dans pas mal de points soulevés par ce test que ce soit pour ses qualités ou son principal défaut. On peut rajouter que le thème un peu morbide et à la limite de l'abstraction (des milliers de malades représentés par un cube de couleur) ne facilite pas l'immersion, ce qui est un détail important notamment pour les joueurs néophytes.

Je voudrais revenir également sur une affirmation au début de ce test. Pandémie n'est pas le premier jeu coopératif adulte. Il y a notamment, les chevaliers de la table ronde qui date de 2005 et horreur à arkham qui lui a été édité une première fois en... 1987. Par contre, alors que ce type de jeu était assez mineur, les jeux semi-coopératif à la Herosquest leur étant préféré, la qualité de Pandémie a rendu ce type à la mode et une trainée de jeu à suivi.

Ertaï



Ersatz de régnant.

Pour ma part, le dernier jeu collectif auquel j'avais joué est Sambesi . Ce jeu propose de déjouer les plans des méchants contrebandiers en faisant évader les gentils animaux aricains de leur enclos en passant par la rivière.

SpiceGuid



Bénévole qui pousse des caisses

Ertaï a écrit :

"

Moins que la connaissance préalable du jeu, l'envie de jouer pure ou la cérébralité absolue, c'est bien l'hétérogénéité des joueurs qui est la faille de ce jeu autrement bien conçu.

"

Je n'ai pas joué à ce jeu mais je doute que la personnalité des joueurs soit la principale explication au fait qu'un 1 ou 2 leaders dictent la marche à suivre pour 2 ou 3 suiveurs. La principale explication réside sans doute dans le mécanisme coopératif, certains joueurs vont douter de la qualité de leur stratégie ou bien vont douter de leur capacité à l'imposer aux autres. La perspective de devenir le mouton noir peut également être suffisamment dissuasive. En gros le premier joueur qui a l'air sûr de son approche n'a qu'à faire valoir l'argument du "pour votre bien" pour laisser planer une vague menace de non-assistance aux non-collaboratifs et s'assurer une place dans le leadership. C'est du coopératif qui tolère le coercitif.

Ertaï



Ersatz de régnant.

Sans à priori sur le jeu, aucun joueur n'imagine devenir le mouton noir. Au contraire, l'ordre actif/passif se fera très naturellement au début entre les gens qui pensent que d'autres sauraient mieux faire à leur place, et ceux qui pensent effectivement pouvoir gérer, c'est la confiance dont tu parles.

Cette confiance est directement dépendante des facteurs que j'ai invoqués, à savoir la connaissance du jeu, l'envie de jouer et l'envie de résoudre des puzzles intellectuels.

Mais comme je disais, on peut jouer à ce jeu même en n'étant pas un gros joueur. Les règles sont suffisamment simples pour qu'on comprenne rapidement ce qu'il faut faire ou ne pas faire (dans une certaine limite, ce n'est pas un jeu familial).

Le vrai problème c'est le décalage de confiance entre les joueurs. Entre 4 joueurs qui ont la même confiance, le jeu se passera très bien, car chacun pourra discuter du plan à mettre en oeuvre pour gagner. Et ce quelle que soit leur connaissance du jeu, leur envie de jouer ou leur penchant pour la réflexion.

Et les deux derniers facteurs sont bien dépendants de la personnalité quand même, je ne comprends pas bien pourquoi tu en doutes. Et puis si quelqu'un a peur d'être le mouton noir, il ne voudra sûrement pas jouer, tout simplement. Personne ne le force, et si c'est le cas, ce n'est plus le problème du jeu. Ton scénario me semble un peu capillotracté.

SpiceGuid



Bénévole qui pousse des caisses

Alors dans ce cas certains joueurs manquent d'initiative parce que l'enjeu n'est pas assez individualisé.

C'est un peu comme le projet informatique en binome, même si c'est noté il y en a un qui préfère compter sur l'autre et investir son temps dans une matière ou la note sera individuelle. Les enseignants font semblant de ne pas comprendre que mettre une note coeff 1 pour un projet en binome c'est comme mettre coeff ½ à un projet individuel.

À 4 joueurs c'est coeff ¼, on ne peut pas dire que le manque d'implication vient exclusivement des personnes et pas de la règle du jeu.

Tu schématises beaucoup trop la nature humaine. Les raisons peuvent être multiples, les situations différentes. Ce qui est intéressant est que chacune de tes analyses se concentre sur le passif alors que cette situation peut également être dû à l'actif. Un joueur un peu trop sur de soi, expérimenté, avec beaucoup de confiance en soi... Il peut prendre le pas sur les autres joueurs.

Les études sociologiques qui se sont penchées sur les phénomènes de groupe ont révélé que systématiquement devant des obstacles, comme le fait Pandémie, le groupe se choisit un leader. Généralement ce n'est pas le plus compétent mais celui qui à la personnalité la plus forte.

 

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réalisé par Ertaï, designé par Ivaldir, illustré par Izual et Sophie Masure
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