Borgia
, c'est avant tout une famille dépeinte par ses ennemis comme synonyme de débauche, débauche de sexe et de violence. Les frères et sœurs coucheraient ensemble, s'entretueraient, et assouviraient leur moindre désir pervers. Cette réputation, très certainement exagérée, a donné lieu à deux séries, diffusées toutes deux en 2011, l'une produite par
Showtime
, l'autre par
Canal+
. Je parlerai ici de celle de
Canal+
, dont le créateur n'est autre que
Tom Fontana
, l'auteur d'
Oz
.
Les intrigues politiques dans les États pontificaux...
En 1492, Rodrigo Borgia est cardinal, et tandis que le Pape se meurt péniblement, il ne souhaite pas laisser passer la tiare cette fois-ci, comme tant d'autres fois. Il se prépare pour la prochaine élection. Dans le même temps, il planifie le futur de ses enfants, en organisant un mariage pour sa fille Lucrecia, en annonçant à son aîné Juan qu'il sera duc de Gandie, et en nommant son cadet Cesare évêque de Valence.
Mais évidemment, les autres cardinaux le méprisent, lui qui est originaire d'Espagne, et les membres des riches familles d'Italie vont tout faire pour l'empêcher de devenir Pape pour satisfaire leurs propres ambitions, comme les Sforza, les Orsini ou les Colona.
...au milieu d'une Italie profondément divisée
À cette époque, l'Italie est divisée en une multitude de duchés et royaumes, et les États pontificaux forment un territoire bien mince au centre, comparés aux deux grandes puissances de la péninsule : Milan au nord, et Naples au sud.
Les principales factions de l'Italie à la fin du XVe siècle sont Milan et Naples, et dans une moindre mesure les États pontificaux (qui sont en fait l'équivalent d'un royaume), Venise, Florence et Gènes.
Cette lutte d'influence se retrouve entre les cardinaux, et davantage lors de l'élection du Pape, chacun faisant pression et appuyant de tout le poids des royaumes derrière eux pour leurs ambitions. Cette concurrence se retrouve même en-dehors de l'Italie, puisque Milan est alliée de la France, tandis que Naples est celle d'Aragon.
Dans la série, l'accent est particulièrement mis sur les rivalités entre les factions, et chaque personnage tente, en même temps que satisfaire ses ambitions, faire de même avec celles de leur famille voire de la nation dont ils sont originaires.
Une bonne série très axée sur les intrigues politiques
Borgia
met un point d'honneur à expliquer, dès les premières minutes, le contexte dans lequel évolueront les personnages. Partout, les intrigants s'activent au nom de leurs ambitions, tant personnelles qu'au niveau d'une nation, et la série s'articule autour de tous les coups bas et tordus mis en œuvre pour arriver aux fins de chacun. Les amitiés et les inimités se font et se défont au gré des situations, et j'ai personnellement trouvé tout cela plutôt très clair dans l'ensemble et pas très difficile à suivre. La mise en avant de la politique est d'autant plus flagrante que l'on ne verse pas dans ce qui aurait pu être très facile, à savoir le sexe et la débauche à tout bout de champs pour n'importe quelle raison. Bien sûr, il y a plusieurs scènes d'amour et de sexe, mais souvent pour souligner l'influence que cela peut avoir sur la politique ensuite (Polo sera ravi de le savoir). Mais bien sûr, il n'y a pas que l'ambition : il y a l'orgueil, la faiblesse de la chair, la volonté de plaire, et tous ces traits de caractère sont au service de ceux qui savent les utiliser... Sauf quand cela leur dessert.
Dans l'ensemble,
Borgia
est une série très bien faite et plutôt palpitante, bien plus que
Les Tudors
. La première saison est plutôt bien faite dans l'ensemble, on découvre les personnages, et les trois enfants de Rodrigo Borgia ne savent pas encore qui ils veulent devenir vraiment, car tous sortent ou sont en plein milieu de leur adolescence. Parfois, il est vrai que c'en est frustrant.
Dans la deuxième saison au contraire, les personnages sont plus affirmés, déjà se dessine la future personnalité conquérante de Cesare Borgia, et les intrigues sont encore plus intenses que dans la première saison.
Les acteurs sont très bons, le jeu est excellent dans l'ensemble. Mention spéciale au Roi de France Charles VIII, dont l'acteur est si fort qu'à sa seule vue, on en est dégoûté.
Une série très réussie, alors qu'avec ce thème le piège était grand de tomber dans la simple débauche de sexe et de violence, à la manière de la série
Spartacus
. Mais les buts des deux séries ne sont sans doute pas les mêmes. Je pense plutôt que
Borgia
a essayé d'atteindre la qualité de
Rome
.
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